Santa Anna t’as du temps devant toi ? C’est parti.

T’as plein de gens dans ce putain de monde qui justifient leurs actes avec un passé hyper sombre plein de malheur. Moi c’est un peu le contraire. Coté "rentre dans le moule" je suis la reine des démoulés mais par contre j’ai une chatte de folie mi coño!
J’ai pas connu les gens qui m’ont fait. J'les appelles pas mes parents t’aura compris pourquoi. Quand on pose sa môme de cinq/six mois dans un fossé perdu au fond de la Louisiane on veut pas être un parent. Ouais je sais ça part mal mais je t’ai dit que j’avais une chance de folie non?
Mon padre Raul m’a trouvé en revenant d’un chantier. Il était ouvrier pour un immeuble de Bossier-City. Il m’a ramené à sa casa, et il m’a adopté avec ma mère Teresa. Les papiers et les trucs officiels c’était pas trop leur tasse de thé. D’autant qu’ils avaient prévu de se barrer au Mexique reprendre l’hacienda de la mama Imelda, en payant pas les emprunts à la banque US au passage mais c’est si grave que ça ? Mes parents ont disparu des radars pour revenir à leurs racines au fin fond du trou du cul désert de Sonora où les seuls trucs qui viennent te faire chier c’est les armadillos sous les pneus de ton 4x4.
Bref j’ai grandi avec mon frère Julio dans la grande maison de la mama. Je l’ai pas connue elle a claquée quand j’avais deux ans. L’âge et le tabac surtout. Mes parents se sont bien occupés de moi blah blah blah, j’ai grandi j’ai eu douze ans et j’ai perdu mon œil.  
Un accident con en plus, j’suis tombée vélo et j'me suis ramassé la margelle du puits dans la gueule. Y’avait un sale clou rouillé dessus, il m’a balafré la gueule pour se ficher dans mon œil gauche, ça a éclaté comme un grain de raisin. Mon frère me ramène dans la cuisine. Le docteur passe a la maison. On désinfecte, l’hopital est trop loin, j’ai pas de papiers, mes parents non plus, c’est la galère, je te passe les détails. Le côté positif c’est que j’ai pu gouter à la tequila. Bon c’est dégueulasse et en plus mon œil s’infectait.
Dans la nuit ma mère qui me veillait m’a dit que j’avais arrêté de respirer pendant au moins trente minutes. Moi j’avais rien senti je dormais juste comme une bûche a cause de leur putain de tequila pour la douleur. Et le lendemain la plaie s’était améliorée, plus de pus. Elle était toujours dégueulasse mais au moins elle était propre.
On en a pas trop reparlé en famille. La tia Fransesca m’a donné un superbe foulard pour cacher mon œil. Je voyais plus bien les reliefs et je me cassais la gueule dans les escaliers mais au moins j’étais vivante.
Mon père a commencé à bien barricader l’hacienda. Il avait une petite sorcière dans la famille fallait pas que ça se sache. Le docteur a pas cafté. Mieux que ça il a commencé à prendre de mes nouvelles. Au début je me méfiait un peu et puis il m’a avoué pouvoir ausculter les patients par la pensée et j’ai trouvé ça férocement cool. Donc notre docteur était mage, ça a pas mal soulagé mes parents et on a commencé à trouver ça normal dans la famille. La tia Fransesca marmonnait des malédictions mais c’était plus par habitude que par peur de moi. Surtout que c’est moi qui changeait ses draps alors elle avait pas intérêt à me faire chier ou à aller cafter a l’église.

Évidement ça s’est su quand même. Deux ans plus tard le docteur sonnait au portail avec un ado tout maigre a moitié transparent. Il avait récupéré Alijhad dans un orphelinat presbytérien en Géorgie. Le gars était a moitié mort de faim alors on s’en est occupé. Comme il avait une bonne tête et qu’il était assez bricoleur on a décidé de le garder avec nous. Il a grandit. Je crois qu’on a le même âge grosso modo. Il a commencé a me parler de magie, de comment cette merde fonctionne et de pourquoi je devais faire gaffe avec. J’avais plus ou moins déjà compris que c’était pas un cadeau. La fois ou je m’étais méchamment niqué le doigt avec un couteau j’avais essayé de me concentrer pour faire refermer la plaie. Ça avait marché mais mon œil s’était mis à me démanger dios mio! En me regardant dans le miroir j’ai compris que la plaie venait de s’aggraver. Comme si un abruti s’était amusé à me creuser l’œil à la petite cuillère. Depuis ce jour là mon pouvoir tu l’oublie hein. Je m’en sers que pour sauver des vies et encore. Si j’en fait trop ça va mal finir.

Comme on dit, jamais deux sans trois. Avec Julio et Alijhad on venait d’avoir grosso modo dix-sept ans quand on a trouvé une gamine de douze ans évanouie devant le portail. Complètement muette aucune idée d'où elle vient. Même pas sure qu'elle soit mage mais elle avait un plan vers la maison et une grosse balafre dans le dos donc bon on l'a gardé la pauvre niña. J’ai insisté pour qu’on l’appelle Caprille, je trouvais que ça lui allait bien.

A vingt-trois ans je me suis barrée. J’en avais plein le cul de la baraque et je voulais voir le monde un peu. Alijhad est parti bourlinguer et trouver ses vrais parents. Comme si ça pouvait servir à quelque chose. Julio s’est engagé dans l’armée américaine dans une caserne de Californie. La famille a pas compris. Moi non plus. Mais bon ça peut servir d’avoir un pro mage discret dans ce sac a merde. Caprille elle est devenue une sacrée belle femme. Elle aide la famille mais un jour elle voudra se barrer aussi. On a appris la langue des signes avec elle.

Dans mes voyages importants y’a la Tanzanie. Et je dit pas ça parce-que mon meilleur coup est là bas. Mais c’est un peu le voyage qui m’a fait comprendre que le capitalisme c’est de la merde.
A Hawaii je suis tellement proche des Hulama  que je fais partie de la famille. Ohana comme ils disent. Mais ça on verra si je le raconte une autre fois. EN tout cas c'est grâce a eux que j'ai pu mélanger passion et magie. La dance m'aide a canaliser mon pouvoir. Ça veut pas dire pour autant que je m’en sert souvent! Aller pas me coller en médic.
J’ai bourlingué partout pour finir à Moscou l’an dernier. J’avais rejoint un groupe de militant pro mage. Jme suis frottée à la mauvaise paire de seins et je me retrouve fichée et ex belle fille d’un officiel du Service fédéral de sécurité de la fédération de Russie, le KGB en déguisé si tu préfère.  Vu les emmerdes que j’ai failli avoir j’ai besoin d’un coin tranquille pour dormir, manger et baiser sans me prendre des balles. Donc si vous voulez de moi vamos.

Et s’il faut enseigner l’espagnol je vais me démerder.